Cette année nous avons la chance d’avoir un retour d’expérience d’une débutante ainsi de que du légendaire Fernando !
C’est parti pour une plongée avec les requins et les sapins de la Chartreuses !
VERTICALITÉ, BROUILLARD & CONVERSIONS
Je ne sais pas pour vous, boucler le sac est un moment que je remets très souvent à plus tard, parce que “c’est bon, j’ai le temps”, évidemment.
Pourtant depuis l’inscription à ce week-end d’initiation, tout est parfaitement organisé et laisse suffisamment de temps pour anticiper. On a même une très utile to-do list qui aidera les moins prévoyants.
Je crois que ce moment-là cristallise comme une appréhension latente, qui m’est bien familière. Vais-je me sentir assez en forme ? Comment sera l’ambiance du groupe ? Va t’il y avoir des accidents/imprévus ? etc.
Et pourtant, non, vraiment, je n’ai plus de souci à me faire, car j’ai déjà évité un drame à la boutique de la Haute route. Car la veille du départ, au moment de retirer le matériel réservé, j’ai bien récupéré deux chaussures oui, mais deux gauches, de deux marques différentes, aux couleurs très similaires (pour ma défense). Sans me rendre compte de la supercherie, j’arrive chez moi, prête à finaliser le sac, et je reçois un appel du magasin… Ah oui, en effet, ça va être compliqué de skier en l’état. Ouf ! j’ai le temps d’y retourner pour faire l’échange.
Côté météo, on vérifie tous mille fois les prévisions, et on aura particulièrement de la chance, car jusqu’à quelques jours avant le départ, la neige n’était pas fraîchement tombée en Chartreuse…et les températures étaient plutôt très douces pour la saison.
- Vendredi 27 janvier
Rdv très matinal 6h15 à Gare de Lyon, et oui, c’est le prix à payer quand on est francilien et qu’on aime la montagne…
Les visages sont encore froissés de la nuit, les filles sont dans un wagon, les garçons dans un autre. On monte un atelier réglage de ski improvisé sur la table de notre carré filles, espace allegro (le choix de la compagnie ferroviaire s’est porté sur nos voisins de Trenitalia). Pas le choix, car les garçons sont installés eux en silencio…
Arrivés à Chambéry, nous récupérons le van 9 places tout neuf, et déjà certains partagent leurs anecdotes de randonnée finissant à la tombée de la nuit. Pendant que les futurs initiés espèrent justement ne pas se retrouver dans ce genre de situations.
A deux reprises, on me dresse le portrait de Fernando, notamment de son approche pédagogique parfois un peu “old school”, mais toujours sympathique.
J’apprendrai par la suite que… les portraits s’avéraient un peu durcis, mais tout en étant quand même assez proches de la réalité. Il n’y a pas de fumée sans feu, dit-on…
Départ de la 1ère rando :
Les deux autres voitures du groupe nous rejoignent.
Nous sommes prêts, ski chaussés tard dans la “matinée”, vers 12h20. Quand on est débutant, on doit déjà se familiariser avec l’équipement, et ça peut prendre un certain temps : régler les skis, coller les peaux, allumer les DVA, organiser son sac de façon efficace (efficiente, même !), oublier ses gants dans le coffre après avoir chaussé, etc.
Au départ, nous allumons les DVA afin de s’assurer qu’on maîtrise les rudiments anglais du vocabulaire “search/send” et mayday mayday !
Notre groupe de 16 skieurs se divise en trois : 1 débutant accompagné par Stéphane, 1 débutant accompagné par Fernando, et 1 d’autonomes.
Il neige légèrement, il fait frais sans faire froid, environ -5°.
Cette première journée est aussi l’occasion d’apprendre quelques gestes de secours lors de la mise en pratique du trio de choc : recherche de victime (fictive !) au DVA / sondage / pelletage.
Le rythme est assez soutenu, je m’arrête souvent pour grappiller des calories. D’ailleurs avec l’expérience, on apprend qu’il faut pouvoir garder très accessible encas (plusieurs) et eau.
C’est l’heure de découvrir les pas tournants et autres conversions bien ardues menées par Fernando, et ses encouragements : “ Y’a du mieux ! c’est presque ça !”.
Nous faisons une bonne pause à la fin de la montée, au habert de Billon.
Le retour nous fait longer le monastère des Pères Chartreux. Silence religieux, jusqu’à ce que les cloches se mettent à retentir, sûrement l’heure des vêpres pour les connaisseurs.
Environ 4h00 d’effort. Dénivelé positif de 430 m. Un peu moins de 10 km parcourus.
Arrivée au gîte : Découverte du gîte, comme d’habitude, couples et ronfleurs se jettent sur les chambres doubles qui sont au nombre de trois. Les autres connaîtront la douce convivialité du dortoir.
Le gîte et ses hôtes sont très accueillants, les canalisations des douches un peu hasardeuses. Belle occasion pour tester la douche écossaise qui présente des bénéfices pour la circulation du sang.
Quelques bières locales nous attendent patiemment, mais à partir de 18h00, pas avant, on est civilisés 😉
A 18h30 pétantes, nous sommes tous déjà attablés – fourchette à la main gauche, couteau à la main droite – il semblerait que ça creuse ! Prêts à engloutir une originale quiche aux ravioles bien gratinée… Tout comme l’orientation politique que prend la tournure du repas 😉
Avant d’observer les premiers bâillements, l’heure est à la lecture de cartes collective. Personne n’aura le droit de s’égarer…
1ère nuit : les dormeurs ont bien dormi, les ronfleurs, bien ronflé. Certains ont choisi une place trop près du chauffage, pendant que d’autres ont dû chercher une deuxième couverture. C’est là le charme des anciennes bâtisses, il faut savoir s’adapter à son environnement.
- Samedi 28 janvier :
1er p’tit-déj : ambiance bon enfant, on charge les batteries pour la journée. Clémentine dans la poche pour plus tard. L’occasion d’en apprendre davantage sur les préférences culinaires de certains qui préfèrent les yaourts aux compotes…bizarre.
Objectif : Charmant Som – 1660 m.
Départ 9h20, arrivée au col de porte à 13h30. Dénivelé positif de 550 m. Tout juste 10 km parcourus.
Le “bal des voitures” pour optimiser où les garer, gagner du temps au retour quand on sentira tous nos jambes. Petit moment de stress car la voiture patine, c’est plutôt une belle invention les pneus neige !
Journée à nouveau dans le brouillard, j’ai quelques courbatures de la veille. Ça tombe bien, j’ai l’habitude de dire qu’il faut les éviter en ne laissant pas de jour de répit.
Dernier arrêt au troquet du Col de Porte : crêpes, chocolats et bière bien mérités.
On a même le temps de faire un tour à St Pierre de Chartreuse. Je vous conseille l’excellente tomme aux fleurs de la petite Fromagerie du bois des lièvres.
Retour au gîte : la propriétaire nous apprend une sombre nouvelle, la chaudière a lâché dans la journée. C’est la deuxième fois en quelques mois… Elle a été adorable et a filé acheter d’urgence des chauffages d’appoint pendant notre absence. En rationnant un peu l’eau chaude des douches, on a même pu tous en bénéficier.
Fernando nous a confié pour l’apéro au gîte, une bouteille de son fameux thé des Alpes, fait maison, s’il vous plaît. Jérôme a aussi ramené un apéritif de son père, qui est lui plutôt porté sur les arômes de la plante vulnéraire. Et pour terminer le triptyque, durant une balade au centre de St Pierre de Ch. Nous avons eu la chance de mettre la main sur une gentiane de la maison Chartreuse, avis aux amateurs d’amertume. On se lâche un peu, mais quand même il faut assurer le topo du lendemain.
Certains se laissent tranquillement tentés par un tarot au coin du poêle, animé par la chaise musicale des douches.
Puis, c’est l’heure du deuxième et dernier dîner ensemble : croziflette bien réconfortante, il n’en restera pas une miette.
- Dimanche 29 janvier :
Objectif : Col de Mauvernay – 1812 m.
Nous nous divisons en deux groupes pour cette dernière journée. On se mélange davantage : les débutants qui se sentent en forme rejoignent les confirmés, pour une ascension de 1000 m.
Le rythme est plus soutenu que la veille, la dernière partie pour atteindre le col est difficile, mais l’idée d’atteindre le versant au soleil nous motive. Au sommet, soleil et mer de nuages, l’occasion d’apercevoir quelques jolis ailerons. Quelle chance !
On picore au soleil, pendant qu’on découvre un magnifique panorama sur la Dent de Crolles, Chamechaude, la Grande Sure, le Vercors, Dévoluy, le Mont Aiguille au loin. Aussi, les silhouettes d’un petit groupe de chamois se dessinent en face.
Puis arrive le moment de la descente dans le brouillard, quelques grattons et des branches, puis une jolie traversée de prairie où j’ai eu l’occasion de goûter la neige, miam.
On rase à nouveau les murs du monastère. Cette fois, les cloches ne retentissent pas.
Départ 9h10, retour aux voitures à 13h45. Dénivelé positif de 1 000 m. Tout juste 11 km parcourus.
Fin de la journée, cette fois direction la gare.
On a largement le temps d’un petit remontant ou plusieurs. Certains se voient même pousser des ailes, et s’orientent vers des options de dîner locales comme un kebab, salade-tomate-oignon (STO pour les intimes) bien entendu. Et toujours pour faire plaisir aux passagers du carré allegro, il sera emporté à déguster tranquillement bien installés.
En résumé :
La météo était plutôt mauvaise au premier abord, puis meilleure le samedi (le brouillard donnait du charme aux paysages immaculés), et enfin radieuse au sommet, le dimanche.
Cette faculté d’adaptation fait partie intégrante de l’expérience en montagne. N’oublions pas que nous ne sommes qu’une infime partie d’un environnement fragile car bien souvent fragilisé par l’humain, et instable car potentiellement déséquilibré.
Le ski de rando c’est une nouvelle façon d’appréhender la montagne, hors des sentiers battus. Il permet de gagner en confiance et en autonomie, et d’avoir les bases en prévention/sécurité. Ambiance joviale.
En somme, ce fut un chouette séjour d’initiation, en 3 jours nous avons déjà le temps de laisser derrière nous les tumultes de la ville et de renouveler un peu nos cellules.
Merci aux organisateurs, initiateurs, et camarades débutants ou confirmés. Tout est fait pour que chacun.e se sente en confiance, et puisse se dépasser s’iel le souhaite.
Aller plus haut :
Recommandation d’un podcast pour patienter jusqu’à la prochaine excursion en montagne.
Solastalgie : Le mal des montagnes (21 minutes) – un garde de refuge alpin raconte une avalanche.
Pour ma part, je suis très content d’avoir contribué à vous faire connaître les charmes de la Chartreuse (brouillard, requins et sentiers étroits).
Vendredi, journée découverte pour les “débutants”, conversions et recherche de victime d’avalanche dans 30 cm de neige. Le pelletage s’est avéré compliqué. Dans ces conditions, la boucle par la Chartrousette et Billon était ce qu’il y avait de moins pire. Heureusement que les aguerris sont montés jusqu’au col de la Ruchère.
Samedi, on passe de la découverte des conversions à la pratique. Là, c’est plus compliqué pour certain.es ! Mais la crête du Mont Fromage ne résistera pas à la hargne des skieurs. Même en passant par la piste damée. Seule ombre au tableau, celle de l’épais brouillard qui nous empêchera de monter les 200 derniers mètres pour atteindre le sommet. La descente jusqu’au col de Porte et son troquet sera un long fleuve tranquille. Au bistrot, la blanche (la chantilly) coulera à flot
Heureusement que le dimanche, au col de Mauvernay, le soleil nous a permis de découvrir un beau panorama : Dent de Crolles, Chamechaude, Grande Sure, Vercors, Dévoluy. Tout ça émergeant des nuages. La neige était assez skiable et l’itinéraire de descente pas trop technique.
Malgré les conditions limites, j’espère que la Chartreuse vous aura plu. A programmer pour une autre année ? Avec de la neige, certains itinéraires sont fabuleux.
Salutations distinguées
Fernando
PS : les 200 derniers mètres pour atteindre le sommet du Charmant Som. La photo jointe a été prise aujourd’hui 21 Février depuis le Dôme de Bellefont. Triste panorama en ce mois de février. Vous avez eu tout de même un peu de chance.
Au plaisir de vous revoir … avec de la neige.